Stepanavan - Privolnoye

Publié le 23/07/2014 à 15:00 par thierrygras-voyages Tags : vie enfants société photos création fleurs bleu paysage
 Un petit déjeuner extrêmement copieux : outre les traditionnels beurre,  fromage, confiture,  tomate,  concombre,  poivron,  blinis sucrés, pour la première fois de ma vie je leste aussi mon estomac d une omelette aux ... brocolis !
Départ à 9h30 en taxi (4.000 dram, 8 €) pour Privolnoye,  à une quinzaine de km au nord. 
J ai rarement vu Une route en aussi mauvais état. Le chauffeur n a à aucun moment eu l occasion de passer la troisième. 
Le paysage est magnifique, souple et doux. Tous les dégradés de vert semblent s y être donné rendez-vous. Les montagnes qui bordent la vallée présentent des courbes molles et arrondies,  où s accrochent quelques bois et bosquets aux teintes sombres. De gros nuages déposent leur ombre sur ces ondulations. La prairie fourmille de fleurs aux teintes pâles. On dirait un tableau pointilliste, comme si toutes les couleurs de la création avaient été saupoudrees en fines poussières sur ce paysage de steppe. 
Au milieu de ces vastes solitudes,  une chapelle perdue sur un flanc de colline. On traverse deux pauvres villages. Je vois un nid de cigognes sur un poteau électrique. 
Il faudra plus d une heure pour parvenir à Privolnoye. C est un ancien village russe créé ex nihilo en 1840 par les Cosaques du tsar Nicolas I. On y fait un plongeon dans le temps. Le long des rues de terre s alignent des maisons aux toits de tuiles, précédées d une véranda en bois,  parfois peinte en bleu pastel. Malgré les quelques antennes paraboliques qui semblent s y être égarées, le village,  et la campagne d une manière générale,  exsude la pauvreté. Et l on sent bien, à le parcourir, le contraste d une société à deux vitesses. On est bien loin des boutiques,  bars et restaurants de luxe d Erevan ! Des enfants jouent de rien,  sagement assis à construire un petit village de cailloux,  l odeur de fumier enveloppe les lieux, un vieux couple de paysans discute âprement devant une machine agricole hors d âge, les herbes folles envahissent les demeures abandonnées. 
Sur le chemin du retour,  le chauffeur m offre une glace. 
Retour à Stepanavan vers midi, absolument ravi de cette plongée dans l Arménie profonde. 
 
Je me laisse engourdir par la nonchalance de la ville. Je fais un tour au petit musée Stepan Chahoumian. C est LA gloire locale, puisque la ville lui doit son nom, et elle l a conservé, à la différence des autres villes debaptisees et desovietisees. C est un révolutionnaire bolchevik,  ami de Lénine, qui a été fusillé par les Anglais à Bakou en 1918. La maison où il a vécu quelques années a été "mise sous cloche", conservée dans son jus, sous un bâtiment moderne à deux étages qui la recouvre. Du coup c est quasiment la plus ancienne maison de la ville. 
Au second étage, une galerie de peintures, attendrissante dans sa médiocrité, expose 33 tableaux assez laids (je les ai comptés), des photos des soldats tués lors de la Seconde Guerre mondiale, des productions de ce qui doit être le club des peintres amateurs de la ville, des photos du tremblement de terre de 1988, et enfin des gloires nationales, comme Makarian, Sarkissian, et ... Charles Aznavour. 
J apprends au passage,  grâce au français hésitant de la guide du musée,  que la ville est jumelée avec Decines.
Je me pose ensuite dans le parc pour boire un café. Toboggan,  balançoire et tourniquet offrent un divertissement simple aux enfants. Tout dégage une formidable quiétude, une incitation à la paresse. L endroit idéal pour écrire ces lignes en écoutant... Charles Aznavour !